Un trip impressionniste à la frontière de Paris.
Avec l’arrivée du printemps et les premiers week-ends ensoleillés, on rêve tous de promenade en pleine nature et de pelouse fraîchement coupée où s’allonger et flâner. Plutôt que d’aller s’entasser dans le premier parc venu de la capitale, je vous propose d’aller faire une balade culturelle du côté d’Auvers-sur-Oise. La petite commune fleurie aux berges bien vertes a le mérite de se trouver à 40 minutes de Paris. Autant dire qu’avec un pass Navigo, le train ne vous coûtera pas un centime. Et la bonne nouvelle, c’est qu’une fois sur place, on peut tout faire à pieds! Voilà une belle idée d’escapade au milieu des paysages romantiques qui ont inspiré les peintres impressionnistes, et à la découverte des lieux qui leur rendent aujourd’hui hommage.
Pour comprendre dans quel mood les artistes de l’époque pouvaient se plonger avant de manier le pinceau, je vous invite à aller faire un tour au Musée de l’Absinthe.
« Le premier stade est celui du buveur ordinaire, le second celui où vous commencez à voir des choses monstrueuses et cruelles, mais si vous persévérez, vous parvenez au troisième niveau, celui où vous voyez les choses que vous voulez voir, des choses étranges et merveilleuses. » Voilà comment Oscar Wilde décrivait le pouvoir de l’absinthe sur l’esprit.
Dans le musée dédié à la Fée Verte, comme elle était alors poétiquement surnommée, on se replonge dans l’ambiance des cafés du 19e siècle. Et comme je me doute que cette question vous taraude: oui, vous aurez l’occasion à la fin de la visite de déguster un verre d’absinthe, servi selon la tradition, avec une belle fontaine en verre et une jolie cuillère finement ciselée. Autant prévenir les novices: mieux vaut apprécier le goût de l’anis!
Auvers-sur-Oise est avant tout connue pour être le lieu de création de prédilection de Charles-François Daubigny, peintre à l’origine du mouvement impressionniste. Un génie qui a eu l’idée romantique à souhait de construire Le Botin, sorte de bateau-atelier qui lui permettait de pouvoir inviter ses amis à une petite balade sur le fleuve tout en s’adonnant à son art. La nature foisonnante et inspirante des environs est d’ailleurs visible sur les toiles de l’artiste et les décors colorés de sa maison-atelier.
Pour en voir davantage, il faudra se rendre au Musée Daubigny. A l’occasion du bicentenaire de la naissance du peintre, l’exposition Daubigny: aux sources de l’Impressionnisme rassemble 90 oeuvres de l’artiste ainsi que celle des peintres qu’il a inspiré. Une manière de découvrir son affection pour les bords de l’Oise, à la nature légèrement sauvage.
Une visite de la maison du Docteur Gachet permet de découvrir la tradition très classe et créative d’un club d’artistes dandies de la fin du 19e siècle. La bande se faisait appeler la Société des Eclectiques, et avait l’habitude de se retrouver un lundi par mois à 19h pour dîner dans un lieu chic.
Pour convier ses semblables, chaque hôte réalisait à la main son invitation, gravée selon la technique de l’eau-forte.
L’aquafortiste, comme on l’appelle, dessine son motif avec une pointe sur une plaque de métal recouverte d’un vernis à graver. La plaque est ensuite plongée dans un bain d’acide qui « mord » les zones à découvert et laisse intactes les parties protégées. Une fois le vernis enlevé, la plaque est encrée et mise sous presse pour imprimer le motif sur un support.
En cas de fringale, pour le déjeuner, on s’installe à l’une des tables du Relais des Peintres. Dans ce nouveau restaurant, ouvert depuis janvier et mêlant cuisine de bistrot et gastronomie française, on déguste des produits frais et locaux, qui viennent de la ferme voisine.
Le menu varie régulièrement, et j’ai personnellement eu la chance d’y goûter entre autres un suprême de volaille à la sauce au maïs et sésame grillé, avec une purée de pommes de terres fraîche accompagnée d’une chantilly de pop corn… vraiment très fin!
En ce moment, à la carte, on trouve des plats plutôt prometteurs, tels le bar poêlé, risotto citronné, sauce au curry vert, un filet mignon de porc gratiné aux herbes et pécan, crème de panais et espuma, ou encore une souris d’agneau confite avec gaufres de pomme de terre, sauce moutarde-miel.
Du côté des desserts, le Relais des Peintres n’est pas en reste avec une poire after-eight (pochée au Get 27 et servie avec une chantilly de chocolat), un maca-long passion, ou encore un banana bread façon pain perdu.
Dans les ateliers du peintre Emile Boggio, qui y a vécu de 1910 à 1920, les meubles et les murs n’ont pas changé d’un pouce, et le jardin autour est une belle source d’inspiration! On y retrouve, outre les oeuvres de l’artiste, les toiles et sculptures bien plus modernes de son arrière-petit-neveu Xavier.
A ce propos, ne manquez pas non plus l’exposition temporaire de la Galerie municipale d’art contemporain, consacrée cette saison au thème de la lumière. De mon côté, j’ai eu un coup de coeur pour les photos d’urbex de Timea Jankovics.
Entre deux visites, on prend place dans la jolie veranda de l’Auberge Ravoux pour un savoureux goûter. Celle-ci, qu’on surnomme aussi Maison Van Gogh, abrite au premier étage sous les combles la petite chambre dans laquelle le célèbre peintre a vécu ses 70 derniers jours avant de se suicider. Au rez-de-chaussée, dans le café d’artistes à l’ancienne, on vient profiter de l’ambiance paisible et inspirante, et on lorgne sur le menu, en se disant que la prochaine fois, on réserverait bien une table pour le déjeuner…