Essência, l’étoilé de Budapest aux influences portugaises

ohreally Essência

Le mois dernier, je suis retournée à Budapest, ma ville de cœur, à la recherche de nouvelles sensations culinaires. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que je n’ai pas été déçue. Amoureuse de la Hongrie comme du Portugal, j’ai jeté mon dévolu sur Essência, restaurant gastronomique situé à deux pas de la magnifique basilique Saint-Etienne de Pest et revendiquant l’harmonie de ces deux cultures culinaires.

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A la tête de cette adresse qui a récemment décroché une étoile au guide Michelin se trouvent les époux Tiago Sabarigo et Éva Jenei. Après avoir fait ses gammes au Ritz Four Seasons de Lisbonne, puis chez Petrus by Gordon Ramsay ou encore Texture Restaurant & Champagne Bar and Costes Downtown, le Chef né à Évora, au Portugal, a souhaité marier deux identités culinaires fortes qui font la part belle à des recettes traditionnelles transmises de génération en génération. En concrétisant son rêve avec Essência, le couple avait une idée bien précise en tête: permettre aux amoureux de la bonne chère de vivre une toute nouvelle expérience culinaire en leur faisant revivre des souvenirs enfouis. En résulte un mélange subtil au twist très contemporain et un équilibre des saveurs et des textures joliment maîtrisé.

La décoration de la lumineuse salle célèbre elle aussi ce duo culturel avec goût dans un mélange de bleu azur et de bois. L’architecture mêle ainsi influences industrielle et plus ancienne, avec son haut plafond voûté, ses pierres, ses poutres et tuyaux apparents, et ses azulejos tapissant les murs.
Le mobilier en bois et le service en céramique aux tons naturels viennent à leur tout sublimer l’expérience.

Chez Essência on l’aura compris, il est avant tout question d’amour. C’est pourquoi le menu dégustation en trois temps avec accord mets et vins porte le poétique nom de 17 mai, en référence à la date de naissance de leur fille. En ce mois de septembre, j’ai pu profiter d’un menu de saison faisant la part belle aux fruits et légumes estivaux.

Pour commencer, j’ai eu la joie de déguster une huile d’olive portugaise de haut vol dont le Chef a l’exclusivité en Hongrie, qui accompagnait en guise de mise en bouche une tuile à l’encre de seiche qui renfermait en son creux un tartare de truite parsemé d’edamame et d’aneth.Aurélie de Rougé Kirali.fr Essência

En entrée, j’ai choisi un classique de Budapest, servi dans toute bonne cantine: la traditionnelle soupe de cerise hongroise, ou meggyleves. Elle était ici génialement twistée avec une mousse de chèvre et du magret de canard fumé. En plus d’être magnifique, cette recette offrait un parfait équilibre entre l’acidité du fruit, le crémeux du fromage et le gras salé de la viande. Le rose des cerises était relevé par des fleurs d’Alysson maritime violacées et des feuilles de capucine, apportant toutes deux une touche poivrée.

J’ai ensuite eu la joie de dévorer du porc « mangalica », une variété de cochon laineux rustique hongrois très gras. Classée au Patrimoine National Gastronomique, c’est une des races les plus vieilles d’Europe. Les porcs mangalica sont élevés au moins 24 mois en plein air et ne disposent pas d’anneau à leur groin, ce qui leur permet, en plus de leur nourriture aux légumes et céréales germées, une alimentation sauvage de glands, de châtaignes et de racines. En résulte une viande à la graisse crémeuse, cuite à feu doux afin de conserver sa tendreté et son jus.

Avec cette viande était servi un bol de « lecsó », sorte de ratatouille traditionnelle hongroise réalisée avec un mélange d’oignons et de poivrons et tomates épluchées rôtis. Sans doute la plus belle présentation que j’aie jamais vue pour une ratatouille.

Pour accompagner ces délices, rien de tel qu’une bonne bouteille de vin. Et si la Hongrie est réputée pour ses vins blancs liquoreux comme le Tokaj, elle propose également une belle variété de rouges. Mon choix s’est porté sur un Maestro Zalan 2018 (Merlot et Cabernet Franc) du domaine Grál Pince, dans la région de Tolna. Un rouge tannique et puissant qui s’accordait parfaitement au gras du porc et à l’acidité du lecsó.

Enfin, au moment du dessert, mon cœur balançait entre Lisbonne et Budapest. J’ai donc plongé ma cuillère dans deux spécialités nationales revisitées. D’abord, j’ai goûté l’Eszterházy torta, le gâteau hongrois préféré d’Éva. Nommé d’après le prince, il est inventé à Budapest à la fin du 19ème siècle. La version classique se compose d’une alternance de crème au beurre épicée au cognac ou à la vanille et de pâte à macaron aux noix. Chez Essência, il est twisté avec de la pistache, de la mûre et de l’hibiscus.

Puis, j’ai croqué dans la Torta de Laranja, un rouleau éponge à l’orange que le Chef avait l’habitude de dévorer le week-end quand il était enfant, ici revisité avec huile d’olive, basilic, chocolat et crème vanille.

Alors que j’allais quitter la table, pour terminer de me convaincre, je vois arriver une dernière petite surprise: de délicieux pastels de nata préparés comme au Portugal et servis sur un carreau d’azulejos bleu. Voilà une adresse qui aime nous prendre par les sentiments!

: Essência, Sas utca 17, 1051 Budapest, en Hongrie.

Aurélie

Journaliste et illustratrice, food & flowers addict. Boulimique d'idées et de lieux créatifs et pointus, à Paris et autour du monde.

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